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dimanche 9 juin 2019






De la différence entre raisonner et penser

ou

Comment passer de la collaboration à la résistance



Je viens d’écouter l’émission « La conversation scientifique » animée par Etienne Klein. L’émission était consacrée à Jean Cavaillès. Celui-ci était philosophe, mathématicien et résistant très actif. Il est exécuté en 1944. Mon précédent article ayant porté sur le néo-pétainisme, cette figure du penseur en action ne pouvait que m’intéresser.  

C’est dans la conclusion qu’a surgi un élément qui peut éclairer notre époque. Une intervenante dit que « la résistance amène à la pensée. Qu’il y a une différence entre penser et raisonner. » Elle continue en expliquant que Vichy et la collaboration était dans le raisonnement : puisque la France était vaincue, il fallait se mettre dans la roue du vainqueur et aménager le présent.
Aujourd’hui on va entendre « La mondialisation s’impose à tous, il faut s’insérer dans le mouvement », « Le patronat est en position forte, on se doit de négocier au mieux l’aménagement des nouvelles conditions de travail », « la France n’a pas les moyens de s’opposer au nouvel ordre mondial » .

On pourrait multiplier ses phrases qu’on entend à longueur de journée dans la bouche de politiques, syndicalistes style CFDT, journalistes à la botte. C’est donc bien un discours consubstantiel de la collaboration. Les maîtres ou vainqueurs changent mais les réflexes subsistent. La base de l’ordo-libéralisme est donc en premier lieu un acte de soumission. Pour en tirer parti, on va ensuite collaborer d’abord de façon « passive » puis, face à la montée des mécontentements, de façon répressive. La camarilla actuelle au pouvoir se prétend le cercle de la raison. On devrait plutôt dire le cercle des raisonneurs. « Dans la situation de déficit de la France, on doit réduire les dépenses publiques » = soumission à la doxa néolibérale et L’UE + aménagement : réduire les dépenses ».

Maintenant on aurait tort de penser que le « raisonnement collabo » est réservé à l’élite dirigeante. On peut la retrouver sur une forme qui ressemble à de l’opposition mais qui, en fait, respecte les règles du jeu imposées par l’adversaire. On fait au mieux avec le peu d’autonomie qu’on nous laisse. A trop vouloir être dans les clous d’une pseudo-démocratie, on en fabrique pour sceller le cercueil de nos espérances. Quoi que l’on fasse, l’adversaire versera le soupçon de l’anti-démocratie et la caricature des personnes et des idées.


C’est là qu’intervient la pensée synonyme de disruption et de résistance. La pensée n’a que faire de l’état de fait. Elle casse les barrières et permet la construction de l’autonomie de l’individu car, pour sortir du cadre, il faut d’abord le connaître et l’identifier. Cela demande une énergie supérieure au simple raisonnement qui peut souvent se résumer à une succession d’éléments de pensée prémâchés ou de poncifs impensés.

On retrouve en filigrane cette dichotomie dans la « lettre de rupture » de Charlotte Girard à la France Insoumise. Au-delà du fait que je la trouve particulièrement juste, équilibrée et intelligente, elle pose la question de l’aporie d’un mouvement se voulant horizontal mais qui est structuré comme un mouvement à la conquête du pouvoir. D’un côté on est dans le raisonnement à savoir la soumission aux règles de Vème République qui, in fine, empêchera toute conquête du pouvoir. De l’autre, la pensée disruptive n’est pas canalisée par une profusion d’intérêts divergents et anarchiques. C’est ce qui explique la non rencontre entre le Gilets Jaunes et la FI alors que les revendications sont les mêmes. C’est comme si les GJ sentaient confusément que les demandes supportées par la FI n’aboutiraient jamais par les moyens politiques classiques. Il ne suffit pas d’utiliser de grandes expressions comme « la Révolution citoyenne » pour que la mayonnaise ne prenne. Il faut que dans les faits, il y ait à un moment donné quelque chose de concret qui se passe. La théorie du papillon ne fonctionne qu’à partir du moment où l’air remué par ses ailes peut circuler librement. Si le papillon est dans une bouteille, il ne se produira rien. Et c’est ce qui se passe aujourd’hui; le carcan médiatique étouffe la contestation. Les RS ne sont qu’une loupe déformante de la réalité comme in a pu le voir pour les élections européennes. D’où la déception de ceux qui y ont cru.

Alors quelle peut-être la solution ?
Premièrement faire primer la pensée sur le raisonnement. Pour qu’il y ait une vrai pensée, il faut qu’elle soit « out-of-the-box ». Sortir des schémas de la politique classique, redéfinir les moyens pour arriver au pouvoir. Ne pas penser que les quelques passages de socialistes au pouvoir se répéteront pour une pensée plus radicale. Prendre conscience que d’un côté la grande masse est apathique pour diverses raisons et de l’autre une classe moyenne supérieure qui reste aux ordres de la classe dominante pour en recueillir quelques miettes (en gros ceux atteint par le syndrome du larbin).
N’ayant pas le courage physique d’un Jean Cavaillès, je me contenterais d’essayer de penser et d’apporter des éléments de compréhension d’une réalité complexe.

PS1 :
Rapidement sur les élections européennes. Pour moi ce n’est pas une défaite. On aurait pu avoir mieux mais au vue du contexte ce n’est pas si mal. En terme de nombre d’électeur et de siège c’est une progression par rapport aux dernières européennes qui ne peuvent être que le seul élément de comparaison n’en déplaise à tous les agents de propagande qui s’obstinent à comparer avec les présidentielles.

PS2 : La nouvelle polémique sur les journalistes.            
J’ai un mépris souverain pour la grande majorité (pas la totalité) de la caste médiatique qui n’a de journaliste que le nom et qui sont les agents de propagande de l’ordre établi. Pour moi, il n’y aucune différence entre un journaliste du Monde ou de la Pravda à part que le second assume sa fonction.
Ils se prennent pour des Woodwad et Bernstein (Watergate) et ils ne sont que des Rebatet (journaliste de « Je suis partout »). Et encore Rebatet avait le courage d’assumer sa subjectivité. Eux ne l’ont même pas. Le frère de Cain se targue d’être attaqué par les extrêmes signe d’impartialité. Ce raisonnement sophiste est simplement la preuve qu’il est au service du système en place sinon il serait critiqué par tout le monde.
Ils se font peur en criant à la dictature pour l’utilisation du mot « rubricard » . En revanche, pas un mot de soutien à Assange dont ils ont utilisé à profusion les révélations car il faisait leur boulot.
Il n’y a pas de matière assez vile sur Terre pour pouvoir les qualifier.

PS 4 : Définition de la pensée par Alain



Jean Cavaillès : https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Cavaill%C3%A8s

La conversation scientifique : https://www.youtube.com/watch?v=R5QitqDetso

Lettre de Charlotte Girard : https://www.facebook.com/AvecCharlotteGirard/posts/1096052570592850?__tn__=-R

Watergate : https://fr.wikipedia.org/wiki/Scandale_du_Watergate

Rebatet : https://fr.wikipedia.org/wiki/Lucien_Rebatet

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